mercredi 28 février 2018

Mille petits riens, Jodi Picoult



Après avoir adoré "La tristesse des éléphants", le roman précédent de Jodi Picoult, j'ai sauté de joie lorsque j'ai eu l'occasion, grâce à une édition privilégiée de Masse Critique de Babelio, de lire en avant-première son nouveau livre !

J'ai donc reçu les épreuves non corrigées (une première pour moi, je me suis sentie bêtement importante) de ce pavé de près de 600 pages, déjà un grand succès en Amérique, et dont l'adaptation ciné avec Julia Roberts est annoncée.

Le résumé de l'éditeur :

Ruth est sage-femme depuis plus de vingt ans. C'est une employée modèle. Une collègue appréciée et respectée de tous. La mère dévouée d'un adolescent qu'elle élève seule. En prenant son service par une belle journée d'octobre 2015, Ruth est loin de se douter que sa vie est sur le point de basculer. Pour Turk et Brittany, un jeune couple de suprémacistes blancs, ce devait être le plus beau moment de leur vie : celui de la venue au monde de leur premier enfant. Le petit garçon qui vient de naître se porte bien. Pourtant, dans quelques jours, ses parents repartiront de la Maternité sans lui. Kennedy a renoncé à faire fortune pour défendre les plus démunis en devenant avocate de la défense publique. Le jour où elle rencontre une sage-femme noire accusée d'avoir tué le bébé d'un couple raciste, elle se dit qu'elle tient peut-être là sa première grande affaire. Mais la couleur de peau de sa cliente, une certaine Ruth Jefferson, ne la condamne-t-elle pas d'avance ? 

Dès les premières pages, j'ai adoré cette histoire. L'écriture de Jodi Picoult, que j'avais déjà appréciée précédemment, est toujours là. Les chapitres alternent les voix de Ruth, son avocate Kennedy et le jeune père Turk. Ce dernier, imbuvable une bonne partie du roman, ne nous épargne aucun cliché sur les Noirs, les Juifs, les homosexuels, bref, une ordure. Sa femme ne vaut guère mieux, ce qui rend assez difficile l'empathie pour la perte de leur bébé ...

Ruth et Kennedy sont deux touts grands personnages, qui vont devoir s'apprivoiser pour gagner, l'une sa liberté, l'autre son tout premier procès pour meurtre.

Le sujet du roman est passionnant et nous fait réfléchir sur le racisme, bien sûr, qu'il soit conscient et affiché, ou beaucoup plus sournois et à peine visible. Sur notre société, sur la justice américaine, les erreurs médicales, la difficulté du métier d'infirmière, la maternité, les combats que Ruth choisit de mener, au prix peut-être de sa liberté : toute cette colère emmagasinée en elle, elle veut pouvoir l'exprimer à la barre, malgré les conseils de son avocate, en risquant d'être condamnée pour cela.

Les personnages évoluent tous, même celui du suprémaciste Blanc, même si j'ai eu du mal à y croire totalement ... Malgré quelques longueurs dans la partie du procès, où beaucoup de témoins disent et redisent la même chose, infligeant au lecteur tout ce qu'il sait déjà et qui a été dit à peine quelques pages en arrière, j'ai beaucoup aimé ce roman, qui aborde des thèmes importants, très actuels (il suffit de penser aux Noirs abattus par la police américaine, notamment), et une belle réflexion sur le racisme et les "mille petits riens" de tous les jours qui peuvent en venir à bout, le tout avec une histoire passionnante et de très beaux personnages de femmes.

Je remercie de tout coeur Babelio et les éditions Actes Sud pour leur confiance !

"Mille petits riens", Jodi Picoult, Actes Sud, 2018

Mille petits riens par Picoult

jeudi 22 février 2018

Te laisser partir, Clare Mackintosh



Un soir de pluie à Bristol, un petit garçon est renversé par un chauffard qui prend la fuite. 
L’enquête démarre, mais atteint rapidement son point mort. Le capitaine Ray Stevens et son équipe n’ont aucune piste. Rien. 
Après cette nuit tragique, Jenna a tout quitté et trouvé refuge au pays de Galles, dans un cottage battu par les vents. Mais plus d’un an après les faits, Kate, une inspectrice de la criminelle, rouvre le dossier du délit de fuite. Et si l’instant qui a détruit tant de vies n’était pas le fait du hasard  ?'


Commencé avec un peu d'appréhension (moi et les histoires sordides liées aux enfants, ça le fait pas trop), puis dévoré avec enthousiasme, j'étais dans le train, à peu près à la moitié du livre, quand soudain j'ai poussé un hoquet de surprise.

Oh. 

Oh comme je me suis fait balader. Je suis revenue en arrière, j'ai relu le début, sous un autre angle, bref, un bon gros retournement de situation, qui venait à pic, quand l'histoire commençait à se faire longuette, à piétiner. A partir de là, je me suis plongée avec une double ration de bonheur dans mon petit thriller plus si banal, et extrêmement bien ficelé. Alternant les points de vue des personnages, le roman se lit avec avidité et mérite son petit succès (un million de lecteur conquis, ma bonne dame, rien que ça !).

Clare Mackintosh a officié dans la police, et ça se sent. Son intrigue est passionnante, son twist renversant, son bouquin de ceux qui vous font passer un excellent moment de lecture. Foncez !


"Te laisser partir", Clare Mackintosh, Le livre de poche, 2017, 512 pages

mardi 13 février 2018

Éparse, Lisa Balavoine




Je suis un mouton victime d'Instagram : après y avoir vu et revu "Éparse", avoir tournicoté autour en librairie, l'avoir ouvert, presqu'emporté, puis reposé, je me suis finalement jetée dessus après la xième chronique de blog passionnée et passionnante, pleine d'appréhension et d'attentes : et si ce roman que tout le monde porte aux nues, et si moi je le trouvais banal ? S'il ne me touchait pas ?

Nous sommes partis trois jours à Disneyland Paris, et je l'ai ouvert dans la voiture, une fois nos petites têtes blondes assoupies. Au bout de quelques pages, j'avais le coeur serré, et à la moitié du livre, les larmes aux yeux, j'ai posé la main sur celle de mon amoureux et je l'ai serrée très fort. J'ai refermé le livre, puis je l'ai repris petit à petit, picorant quelques lignes ici et là, éparses, savourant le texte, cornant des pages, relisant certains passages.

Je l'ai terminé à regret, j'en aurais bien lu 500 pages.

Sous-titré "roman", ce texte l'est-il réellement ? En paragraphes séparés d'une étoile, Lisa Balavoine fait l'inventaire de sa vie : celle d'une femme de 40 ans, divorcée, mère de trois grands enfants, qui se plonge dans ses souvenirs d'enfance, la séparation de ses parents, ses amitiés, son adolescence, ses premiers émois, la maternité, sa vie de femme, le sexe, les ruptures, la musique, les livres, tout ce qui fait une vie.




Et c'est quasiment universel : c'est la force de ce texte, chacun (et surtout chacune) s'y retrouve, à un moment. On a tous les mêmes souvenirs d'enfance, de vacances, d'émois, de rêves. Lisa Balavoine alterne les passages déchirants à propos d'une rupture avec des listes d'hommes célèbres qu'elle aime, des phrases toutes faites entendues, de répliques de films, de paroles de chansons. Elle nous fait voir la bande originale de sa vie, et ça pourrait être la nôtre.

Ce que j'ai préféré : ses anecdotes, si vraies, si touchantes, et les passages sur la maternité.
Le roman respire la nostalgie et la mélancolie, l'ultramoderne solitude, les regrets, les souvenirs douloureux, et m'a bouleversée à chaque page.




Il m'est difficile d'en écrire une chronique construite, à l'image du livre que je viens de terminer. Je jette sur le clavier mes impressions à chaud, et mon sentiment d'avoir lu quelque chose d'original dans sa forme, mais de profondément humain, et sais déjà que je vais le relire, plus lentement encore, et corner d'autres pages.

Merci Lisa, j'ai un peu l'impression de vous connaître à présent ...


"Eparse", Lisa Balavoine, Lattès, 2018, 250 pages, et une jolie bande originale à la fin

mardi 6 février 2018

Emma dans la nuit, Wendy Walker




Quand on m'a proposé de recevoir le nouveau roman de Wendy Walker grâce à une édition de Masse Critique privilégiée sur Babelio, j'étais enthousiaste. J'avais aimé son premier roman, "Tout n'est pas perdu", du moins en avais-je gardé le souvenir d'une bonne intrigue psychologique. Je remercie d'ailleurs les éditions Sonatine et Babelio pour cet envoi ;-)

Le pitch : les soeurs Tanner, Emma et Cass, ont mystérieusement disparu, sans laisser de traces, un soir, après une dispute. Enlèvement ? Fugue ? Accident ? Nul ne le sait. Trois ans plus tard, Cass réapparaît. Le FBI, accompagné de la psy Abigail Winter, passionnée par l'affaire, interroge alors Cass, qui clame avoir été victime d'un enlèvement et emmenée sur une île mystérieuse, où sa soeur Emma serait toujours captive. Mais rien n'est simple dans l'histoire de Cass, et surtout dans cette famille dysfonctionnelle, où les secrets et les coups bas sont rois.


Après avoir lu ce roman, je me suis penchée sur ma critique de "Tout n'est pas perdu", et, bingo, je pourrais vous réécrire la même.

A savoir que, selon moi, voici un excellent page turner psychologique, dont l'intrigue ne souffre d'aucun temps mort, plein de fausses pistes, où le lecteur se passionnera à démêler le vrai du faux, et tournera les pages avidement, peut-être y passera une nuit blanche.

C'est effectivement une bonne histoire. Mais c'est tout. On pourrait en faire un téléfilm du dimanche soir, où l'on se plongerait dans l'intrigue comme dans un bon bain chaud.

Mais côté écriture, côté émotions, zéro, nada. L'écriture est froide et si j'ai apprécié les explications psychologiques assez poussées sur certains troubles de la personnalité, que j'ai trouvées très intéressantes, je n'ai pas réussi à m'attacher aux personnages. Aucun empathie pour Cass ni Emma, et la sensation d'un grand n'importe quoi, d'une intrigue bien ficelée mais complètement tirée par les cheveux, et surtout un grand regret : l'absence d'écriture, de musicalité, d'émotions.

C'est pour trouver tout cela que je lis : une bonne histoire ne suffit pas. Sinon je regarde Netflix.

Au final, un roman aussitôt lu, aussitôt oublié, mais qui devrait rencontrer son public ...


"Emma dans la nuit", Wendy Walker, Sonatine, 2018